Test Blu-Ray : King Kong (2005)
Publié le par la Rédaction
'King Kong' est vraisemblablement l’un des plus célèbres films de monstres de l’histoire d’Hollywood. Œuvre sortie en salle en 1933, le film évoque aujourd’hui beaucoup de choses ; sans doute les moments les plus mémorables de l’histoire du cinéma fantastique. A lui seul, l’épisode du Roi Kong escaladant l’armature métallique de l’Empire State Building avant d’être sauvagement mis à mort, a les capacités d’évoquer symboliquement les plus grandes tragédies de l’histoire des grandes cités qu’elles nous soient antérieures, contemporaines ou à venir. On peut parler en ce sens d’une œuvre mythique. Si 'King Kong' s’appuie dans une large mesure sur de très grandes structures mythologiques, son succès populaire révèle les capacités que possède le cinéma moderne à générer ses propres mythes.
Une preuve de la richesse accolée à l’œuvre King Kong ? Cette atemporalité dont a su faire preuve le film au fil des années écoulées. Ce remake de 2005 signé Peter Jackson le prouve bien car il affiche une symétrie très rigoureuse à l’égard de l’œuvre originale de 1933. L’histoire reste en effet inchangée et le schéma narratif du film suit son parcours linéaire structuré rigoureusement de façon tripartite. L’aventure s’inscrit dans le même contexte économique et social des années 30 et 'King Kong' se voit bien capturé puis sacrifié par cette même civilisation confrontée à une crise profonde. L’aventure nous plonge au préalable dans les décors surnaturels de Skull Island et les effets spéciaux sont toujours aussi impressionnants - une fois mis à niveau grâce au savoir faire de Weta Digital, déjà à l’origine des effets spéciaux de Lord of the Rings. En somme, Peter Jackson a su remettre à jour une œuvre classique et révélé sa magie, sa puissance métaphorique, avec la force des technologies numériques modernes. Sur ce terrain, il a su faire preuve d’une extrême intelligence, ayant choisi, contrairement au remake de 1976 de John Guillermin, de restituer, tels quels, les grands épisodes ayant marqué l’œuvre King Kong originale. Peter Jackson s’est attaché d’abord aux personnages. Il a aussi respecté profondément la dimension mythologique du film. Il a effectué en quelque sorte un simple flashback, comme si le 'King Kong' de 1933 renfermait un présage nous concernant directement, nous citoyens du 21ème siècle installés devant nos écrans.
Et il est clair que l’Empire State Building, structure monolithique achevée en 1931, se destinait, selon la logique propre aux mythes, à être pris d’assaut par un monstre à la fois gigantesque et venu d’ailleurs. Figure mythologique, la tour, le gratte-ciel, est une icône classique. Selon le courant gnostique, l’érection d’une tour symbolise la volonté de nos âmes déchues, prisonnières ici-bas, de retourner à une sphère céleste, forme de paradis originel perdu. L’évocation de la construction d’un gratte-ciel évoque bien sûr Babel, la porte du ciel, symbole des orgueilleux bâtisseurs qui ont cherché à remplacer la révélation du ciel par ce qu’ils ont forgé eux-mêmes. Et 'King Kong', au travers son parcours qui l’amènera à passer du statut de sacrificateur au bouc-émissaire, évoque quelque part ces grands épisodes de l’histoire de l’Homme, l’éternel cycle évolutif alternant élévation, chute et renaissance.
Prisonnier de la caverne intérieure et platonicienne du Skull Island - ou « l’île du crâne », une île où l'instinct de conservation est primordial et qui fait ainsi écho aux ressources de notre cerveau primaire, reptilien - 'King Kong', en grand mammifère nous est présenté comme le roi d’une civilisation qui lui est quelque part antérieure. C’est une période venue d’outre-tombe, préhistorique. Si les grands reptiles parvinrent à la domination de l’île grâce à leur force physique et les formidables armes naturelles que représentaient leurs mâchoires, ils ont du céder leur place à ce grand mammifère, qui les remplaça comme maître de la terre. Le cycle naturel inhérent au processus évolutif amènera 'King Kong', de la même manière, à chuter de l’Empire State Building, symbole d’une civilisation supérieure à la sienne. Et cet épisode cyclique de chasse, de sacrifice royal, préfigure quelque part la chute de l’humanité elle-même. A l’instar du roi Kong longtemps dominateur d’une civilisation antérieure, notre cité moderne, symbolisée par l’hyper puissance financière, finira par s'écrouler à l’image du monstre Kong, roi d’une époque mais qui termine son aventure par une terrible chute. Le parcours du monstre de Peter Jackson révèle ainsi un avertissement, un présage, un signe divin. Le Roi Kong représente la cité, la ville-machine impersonnelle et sa chute, fort symbolique, en préfigure une autre : la nôtre, que celle-ci soit actuelle ou à venir, fictive ou bien réelle.
La symétrie entre les lois du monde moderne, la société archaïque de Skull Island, et celle de l’industrie cinématographique est d’ailleurs frappante, étonnante. Si 'King Kong' est invincible dans son milieu, il deviendra la victime, le bouc-émissaire de la civilisation moderne. De la même manière qu’Ann Darow sera offerte au Dieu Kong durant son épopée archaïque, la cité New-Yorkaise offrira en sacrifice à ses nombreuses divinités (quoi qu'on en dise bien babyloniennes) l’énergie vitale d’un ancien roi : King Kong. L’enjeu ? C’est la croissance, moteur d’une civilisation où l’argent est devenu maître. C’est ce besoin d’élévation artificielle et perpétuelle d’une tour qui n’a plus de limite, l’Empire State Building, symbole d’une cité mondialisée, touchée au 21ème siècle par une crise profonde qui n’est pas sans rappeler celle des années 30. Ce sacrifice du héros, du bouc-émissaire - le thème du sacrifice héroïque est un thème majeur du cinéma fantastique - prendra dans l’œuvre de Peter Jackson de 2005 une dimension presque prophétique. La chute de King Kong, tout comme à un certain niveau la destruction des deux Tours Jumelles de septembre 2001, vient d’une façon orchestrée presque rituelle, ouvrir les portes à l’établissement d’une nouvelle civilisation : celle qui naîtra peut-être après la crise…
Le braconnage du monstre s'apparente quelque part à une quête sacrée, une chasse royale. Et le destin tragique de Kong révèle le thème général du film. Il reflète l’image éternelle de toutes les formes de cités. En réalité, le monstre King Kong figure une force débordante qui est bien une démarche de civilisation. Celle-ci est proche de celle d’un réalisateur de films qui encadre, exclut, souhaite tout contrôler mais qui finit contre son gré par capturer, détruire et sacraliser les différentes formes de violence tout en excellant dans l’art de se déresponsabiliser. « C’est la Belle qui a tué la Bête » nous dit-on…
Peter Jackson s’est ainsi attaché à des thèmes mythologiques essentiels. Il s’est même quelque part réapproprié la métaphore évolutive du cerveau triunique, l’aventure de l’île du crâne pouvant à un certain niveau s’assimiler au passage à des formes successives d’intelligence : les héros passant du cerveau reptilien primitif, limbique jusqu’au néocortex. L’épopée héroïque de 'King Kong' se déroule en effet en trois étapes, trois dimensions importantes : de l’instinct de survie qui s’impose sur l’île du Crâne peuplée de créatures reptiliennes, à l’émotion d’une expérience amoureuse entre Kong et Ann Darow, jusqu’au domaine de la représentation symbolique propre au néocortex au moment où 'King Kong' est devenu un acteur à part entière dans un célèbre théâtre new-yorkais.
Entre barbarie, bestialité, et humanité, 'King Kong' est une créature fabriquée par l’imagination des hommes. Il est un égrégore à la fois sacré et monstrueux dans lequel chacun peut puiser, explorer, dénicher du sens. L’exploitation du mythe du monstre, menaçant la destruction d’un édifice symbolique montre que Jackson est un grand amoureux et fin connaisseur du cinéma fantastique. Il est parvenu d’une très jolie manière à mettre à jour, avec ses talents de metteur en scène, la puissance d’un des plus grands mythes de l’histoire du cinéma moderne, un film qui recèle encore aujourd’hui de bien nombreux et riches enseignements collectifs. Mais sommes-nous prêts à les entendre ?
Le test technique du Blu-ray est à suivre en page suivante...
Qualité Technique et Bonus
Caractéristiques
Vidéo : Transfert 1080p MPEG-4 VC1 (Débit moyen de 16326 kbps) / Format 2.35
Audio : Anglais en DTS-HD Master Audio 5.1 (Débit de 4180 Kbps / Encodage 24-bit), Français, Allemand, Italien, Japonais et Espagnol en DTS 5.1 (768 Kbps / 24-bit)
Sous-titre : Anglais, Chinois, Allemand, Néerlandais, Français, Grec, Italien, Japonais, Coréen, Norvégien, Portugais, Espagnol et Suédois
Qualité vidéo
'King Kong' débarque dans une édition Blu-Ray visuellement irréprochable. Les deux versions, courte ou longue, sont disponibles sur le même disque. Bénéficiant d’un encodage VC-1, il vous sera bien difficile de mettre en défaut ce transfert, à la fois moderne via le rendu numérique de nombreux arrière-plans, mais classique grâce aux choix photographiques - de lumière et de couleurs - assez rigoureux. Les qualités auxquelles nous habitue le format Blu-Ray (lorsqu’il est en forme), sont bien présentes sur ce disque. La définition est impeccable. Sans en faire des tonnes, elle parvient toujours idéalement à révéler les plus fins détails des premiers, seconds et arrière-plans. Prenez ces nombreux gros plans focalisés sur les expressions de 'King Kong' et appréciez-en toutes les subtilités, jusqu’au moindre poil, qu’il soit court, lisse, luisant, de couleur noire ou mêlée de brun. Incroyable ! La colorimétrie est vraiment sophistiquée sur ce long métrage. Retouchée bien sûr par un étalonnage numérique, elle se veut complètement réussie, s’acquittant de représenter la ville de New-York des années 1930 d'une façon sévèrement réaliste. Cette séquence est forte de dominantes grises et boisées et toutes les couleurs primaires semblent avoir été bannies; contexte difficile des années 30 oblige. S’en suivront les paysages fantastiques aux primaires plus abondants peuplant l’épopée Skull Island forts d’arrière-plans numériques un brin artificiel, mais adaptés à ce genre de voyage hors-du-monde, fantastique, extraordinaire. Les contrastes ne semblent jamais perfectibles. Voilà un transfert au rendu bel et bien haute définition. Magnifique.
Qualité audio
'King Kong' fut acclamé par la presse du monde entier par les qualités de sa piste DTS-HD Master Audio 5.1 (version originale) frôlant souvent les 5 sur 5 étoiles, remportant à l’unanimité les honneurs médiatiques. Et il est clair que cette piste présente de sérieuses qualités et nous ne bouderons pas aujourd’hui notre plaisir. Seulement, on aurait pu s’attendre à une expérience encore davantage immersive comme le prouvent les performances affichées par la petite DTS 5.1 VF (768 Kbps) qui en tout point se montre largement supérieure à la version originale pourtant forte d’un débit monstrueux de 4180 kbps. Pour s'en convaincre : quelques secondes suffisent. Prenez-le temps de comparer les deux versions et vous constaterez sans l’ombre d’un soupçon l’apport de dynamique, l’agressivité des sonorités, un registre grave plus appuyé et une scène arrière bien plus élancée sur la petite VF DTS mi-débit. Surprenant ? Oui, mais ce n’est pas non plus la première fois ; preuve que la seule compression des données audio ne fait pas tout et que toute les étapes inhérentes à la longue chaîne de production audio ont leur importance.
Au-delà de cette remarque, 'King Kong' en VO comme en VF reste du grand spectacle acoustique. Si l’on privilégie la VF, la dynamique générale affiche de très hautes valeurs. Les ambiances, peinent durant la première section new-yorkaise du film à se montrer infiltrantes, mais parviennent aisément à vous séduire durant la seconde moitié du film. Les voies surround vont s’en donner très régulièrement à cœur joie. Le registre grave est vraiment plaisant sur cette édition reproduisant par exemple toute l’épaisseur de la mécanique motorisée du légendaire SS Venturer et les subilités de la lourde traversée des gros reptiles durant l’escale sur l’île du crâne. C’est James Newton Howard qui a signé la partition forte ici d’une très jolie amplitude. Dommage à nouveau que la VO soit quelque peu en retrait. VF oblige, on doit s'accoutumer des défauts inhérents au processus de doublage (voix proéminentes) si l’on souhaite profiter pleinement du spectacle 5.1, ici supérieur en français. Cela reste dans l’ensemble plus que satisfaisant.
Bonus
Film en version longue (13 minutes environ supplémentaires)
Commentaire audio de Peter Jackson et Philippa Boyens
Option U-Control
Cette section regroupe interviews interactives et galeries d’images via le procédé Picture-in-Picture.
Conclusion et Screenshots HD
Conclusion
'King Kong' réussit parfaitement son passage au format Blu-Ray Disc. Le transfert est magnifique, et les deux pistes audio VO et VF s'en sortent plus que convenablement, même si l'on était en droit d'attendre un spectacle acoustique un brin plus vigoureux en DTS-HD. Petite limitation : les bonus qui sont tout de même assez limités. Mais en réunissant sur un seul et même disque versions longue et cinéma, Universal nous a offert tout de même une excellente composition.
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ScreenShots HD (Extraits redimensionnés en 1280 x 720 pixels et encodés au format .jpg)